Module 1A La planification de l’aménagement d’un boisé

PLANIFICATION VISANT LE LIEU D’UNE ANCIENNE DEMEURE : ÉTUDE DE CAS

La famille Pelly possède un boisé de 160 acres (64,8 ha) dans le comté d’Antigonish. Les membres de la famille se rendent sur le boisé quatre ou cinq fois par an, principalement à des fins de loisir. Un petit chalet devient un paradis confortable lorsqu’ils effectuent le déplacement à partir de leur foyer à Halifax. Peter et son épouse Ellen aiment la solitude que l’ancienne propriété agricole procure.

Descendant direct d’une famille acadienne qui s’était établie dans cette région vers la fin des années 1790, Peter s’intéresse énormément à son patrimoine. Ellen est elle aussi de descendance acadienne. Leur fille Ann‑Eve a mentionné qu’elle aimerait un jour habiter sur les lieux de l’ancienne demeure.

Les Pelly sont une famille occupée. Peter et Ellen travaillent tous deux à temps plein dans la ville et Ann­‑Eve est une élève du secondaire active au sein d’un certain nombre de sports. Les visites que la famille effectue à l’ancienne propriété agricole représentent une pause rafraîchissante au sein de leur rythme de vie frénétique.

Leurs fins de semaine à l’emplacement de l’ancienne demeure sont toujours plus poignantes lorsqu’ils effectuent une visite au minuscule cimetière de trois pierres tombales se trouvant non loin du camp que Peter a construit au cours des années 1980. Le grès qui s’érode et les noms qui s’effacent lentement leur rappellent leurs liens avec cette parcelle de terre.

Les boisés bien aménagés contribuent à des paysages sains

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Pelly aiment surtout se rendre sur la propriété le printemps, lorsque la saison de pêche à l’omble de fontaine ouvre pour deux semaines et que les éthyrones d’Amérique violets longent les fossés en bordure du chemin. À ce moment de l’année, quelques parcelles de neige restent accrochées aux endroits ombragés et tout a une odeur fraîche, comme si l’hiver avait purifié la terre. 

L’automne, Peter demeure souvent dans la cabane durant au moins une semaine. Il prend un chevreuil dans l’ancien verger presque tous les ans et il cueille toujours un boisseau ou deux de pommes qu’il rapporte ensuite chez lui.

Les rares occasions où la famille s’est rendue sur la propriété en hiver, les Pelly ont été agréablement surpris de découvrir que les anciens chemins constituaient des pistes de ski de fond parfaites. Vers la fin février, ils ont souvent entaillé quelques érables à sucre longeant le chemin et préparent de petites cuvées de sirop.

Comme les anciens champs sont en train de retourner à l’état de forêt et que certains secteurs du boisé présentent des signes de chablis, Peter a essayé de nettoyer les arbres qui sont tombés, mais le travail est devenu trop colossal. Il est en train de perdre la maîtrise du boisé et ses visites de deux ou trois jours ne sont jamais suffisantes pour lui permettre d’accomplir tout ce qui doit être fait.

Les Pelly ne savent pas trop ce qu’ils doivent maintenant faire. Leurs visites agréables de jadis ont commencé à se transformer en fins de semaine fastidieuses leur offrant peu de temps pour s’asseoir et se détendre.

Le dendroctone de l’épinette peut être une cause de mortalité parmi les épinettes blanches.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Après s’être entretenu avec un ami qui lui a vanté les avantages de faire partie d’une organisation locale de propriétaires de boisés, Peter a décidé qu’il pourrait s’agir d’une excellente façon d’obtenir quelques conseils avisés. Il a téléphoné à un représentant de l’association qui lui a mentionné qu’une excellente façon de commencer serait de préparer un plan d’aménagement du boisé. Le coût d’un plan, quelques centaines de dollars, semblait un prix minime à payer pour obtenir de bons conseils.

Un technicien forestier agréé a rencontré la famille sur le boisé lors de leur visite suivante. Francis leur a affirmé qu’il avait rédigé plus d’une centaine de plans d’aménagement à l’intention de propriétaires de boisés de l’Est de la Nouvelle‑Écosse. Sa formation et son expérience ont transparu dans la facilité avec laquelle il a traité des options auxquelles les Pelly pourraient souhaiter songer. Dès le moment où Francis a commencé à parler, les Pelly ont été convaincus qu’ils avaient pris la bonne décision en communiquant avec l’association des propriétaires de boisés.  

Un aspect d’une importance fondamentale de la planification, a fait observer Francis, sont les buts et les objectifs des Pelly. S’ils ont des buts et des objectifs réalistes, il y aura toujours un moyen d’aller de l’avant.

Peter et Ellen ont trouvé difficile de définir leurs buts à long terme. Ils consacraient la majorité de leurs visites sur le boisé à accomplir tout ce qui devait être fait – comme réparer le seuil de la porte du camp, dégager les arbres que le vent faisait tomber en travers du chemin ou remplacer le gravier qui semblait disparaître du chemin. Comment pouvaient‑ils penser aux besoins à long terme quand ils avaient tellement à faire?

Francis a expliqué qu’un plan d’aménagement réduirait les préoccupations qui leur semblaient une source constante d’angoisse. L’adoption de buts à long terme, a‑t‑il expliqué, les aiderait à établir des priorités dans les tâches devant être exécutées à court terme.

Il avait raison. Dès le moment où la famille a demandé à Francis de préparer un plan d’aménagement du boisé, les Pelly sont devenus motivés et ont mieux su comment s’organiser.

Ils ont commencé à réfléchir à ce qui constituerait des buts réalistes pour les dix années à venir. Comme Ann‑Eve comptait fréquenter l’université sous peu, leur objectif était de générer 5 000 $ du boisé en l’espace de deux ans. Ils voulaient également prendre les meilleures mesures possible pour maintenir le boisé sain et productif. Peter voulait continuer à profiter de possibilités de chasse, tandis qu’Ellen était toujours ravie de pouvoir utiliser du bois de chauffage pendant leurs séjours au camp.  

Lorsqu’ils entreprirent de retrouver les lignes de démarcation, Peter songea au fait qu’il n’avait pas effectué l’entretien des lignes depuis des années. Ils repérèrent heureusement les quatre coins après quelques recherches. Une clôture de barbelés enfoncée formait deux des lignes et de vieilles encoches sur des arbres marquaient les autres. À certains endroits, le fil métallique se trouvait dans la terre. 

Pendant qu’ils marchaient sur le boisé, Francis leur signala de nombreux points qui avaient échappé à l’attention des Pelly. Il fit observer que le dendroctone de l’épinette était lentement en train de tuer les épinettes dans certains secteurs des anciens champs. Francis utilisa un instrument appelé une sonde de Pressler pour montrer aux Pelly que la croissance de l’épinette avait diminué de façon marquée au cours des cinq dernières années.   

Il préleva ultérieurement à l’aide de la sonde des carottes d’échantillons de sapins baumiers qui poussaient çà et là dans le bas des pentes de la crête de feuillus. Ils purent apercevoir de la rouille commençant à se former près du centre de la quasi‑totalité des arbres. Les Pelly se sont rendu compte que l’aménagement d’un boisé va au‑delà de ce qui est visible à première vue.

La récolte de certains sapins et épinettes au moment opportun, expliqua Francis, maintiendrait la productivité du boisé, car une régénération naturelle s’établirait. L’éclaircissage des peuplements au fur et à mesure qu’ils prennent de l’âge accroîtrait la croissance et maximiserait le rendement. Les autres peuplements inéquiennes pourraient être aménagés au moyen de coupes de jardinage.

Une coupe de jardinage attentive laissera le tapis forestier intact

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un large sourire apparu sur le visage de Peter lorsqu’ils marchèrent à l’intérieur des peuplements de feuillus sur la crête près de l’arrière du boisé. C’était un endroit où il adorait toujours se rendre, en particulier l’automne lorsqu’il pouvait sentir le riche parfum de la terre au moment où les arbres se dépouillaient de leurs feuilles pour l’hiver. C’était un secteur qu’il aurait aimé laisser tranquille pour le moment. Ses arrière-petits-enfants éprouveraient peut‑être les mêmes sentiments lorsqu’ils y marcheraient. Ne serait‑ce pas là quelque chose de spécial!

Francis les amena à un peuplement de résineux à l’abri en se guidant au moyen d’une photographie aérienne. De grosses pruches et épinettes rouges s’y dressaient au‑dessus de bouquets de jeunes arbres. De minuscules semis formaient des tapis verts ici et là... Deux chouettes rayées – aussi grises que les pierres du cimetière – s’éloignèrent en planant parmi les arbres...

Francis leur expliqua qu’ils pourraient prélever certains des arbres à cet endroit afin de créer dans le couvert forestier des ouvertures qui permettraient à la lumière du soleil d’atteindre les semis. Pour éviter de perturber les chouettes qui nichaient de toute évidence à cet endroit, ils laisseraient des zones tampons d’une centaine de mètres autour des nids et réaliseraient les travaux forestiers vers la fin de l’été ou au début de l’automne.

De retour au camp, Francis fit remarquer qu’un plan d’aménagement peut être flexible si les propriétaires de boisés changent d’idée ou si d’autres circonstances surgissent. L’un des véritables avantages d’un plan, a‑t‑il expliqué, est le fait qu’il s’agit d’un document qui peut être montré aux entrepreneurs ou aux autres intéressés afin qu’on comprenne bien les activités envisagées.       

Le plan d’aménagement a été terminé deux mois plus tard. Il précisait les buts des Pelly et énumérait les objectifs nécessaires pour atteindre ces buts. Outre une photographie aérienne et une carte du boisé, le plan comportait des tableaux de description des peuplements et des recommandations. Il décrivait l’état des lignes de démarcation et précisait où un nouveau chemin devrait être construit. Il renfermait même vers la fin quelques pages où les Pelly pouvaient noter leur progrès au cours des dix prochaines années.

Lorsque le temps viendrait de revoir le plan cinq ou dix années plus tard, Ann‑Eve y contribuerait davantage. Pour le moment, Peter et Ellen savaient où commencer, car leurs buts et objectifs avaient été définis.

Ils savaient qu’il reviendrait aux générations futures de décider s’ils avaient bien accompli leur travail.

Les anciens chemins forestiers offrent des possibilités intéressantes pour les loisirs et les futures activités d’aménagement.